Christophe Fouillère : " La dalle est un lieu central, commercial , un lieu de passage obligé, un lieu du quotidien, pour les Villejeannais".
Pour clore cette enquête, tour d’horizon avec Christophe Fouillère. Ce premier article est consacré aux constats. L'élu délégué du quartier de Villejean aborde les différents aspects du quotidien des habitants. Du logement à la mixité sociale, des projets urbains aux animations autour de la dalle Kennedy. (1)
« Villejean ce n'est pas que la dalle Kennedy, ajoute-t-il. C'est un tissu de petits collectifs, avec des squares, il y a de l'habitat pavillonnaire, que nous entendons préserver, il y a du logement social. Il y a de la copropriété privée, du logement privé individuel, du logement étudiant. Il y a des classes moyennes dans le quartier. »
Le paradoxe de Villejean
Pour Christophe Fouillère, la dalle Kennedy résume « tout le paradoxe de Villejean. La dalle est un lieu central, commercial, un lieu de passage obligé, un lieu du quotidien, pour les Villejeannais, pour leurs démarches administratives » . Et, à la fois « Un quartier à mauvaise réputation : incivilités, drogue... » Il y a « ce que perçoivent les gens qui n'habitent pas Villejean et qui y passent, qui traversent la dalle Kennedy pour prendre le métro. » Et un autre fait : « Les gens sont contents d'y habiter. » « Villejean ce n'est pas que la dalle Kennedy, ajoute-t-il. C'est un tissu de petits collectifs, avec des squares, il y a de l'habitat pavillonnaire, que nous entendons préserver, il y a du logement social. Il y a de la copropriété privée, du logement privé individuel, du logement étudiant. Il y a des classes moyennes dans le quartier. »
L'association "Si on s'alliait ?" tient une permanence sur la dalle aux beaux jours (14 octobre 2021)
La dalle, une place de village
« La dalle est une place de village ! Dans le projet d'accompagnement de l'arrivée du métro, elle a été conçue pour en faire un centre du village, un centre ville avec des fonctionnalités commerciales et des services publics. Elle a cette vocation-là. Elle est plutôt réussie de ce point de vue-là. » L'élu y voit des possibilités : « C'est un lieu où l'on peut faire un certain nombre d'animations, de permanences, notamment les permanences d'accès aux droits de « Si on s'alliait ? ». Ce lieu a des vocations positives avec des occupations dysfonctionnelles plutôt en fin d'après midi et en début de soirée. Trois types d'occupation posent questions :
- Des personnes qui s'alcoolisent, le long du cheminement couvert, près du centre social et des petits commerces de proximité.
- Un certain nombre de familles occupent de manière un peu exclusive les aires de jeu ou espaces publics avec une difficulté à partager l'espace.
- Sur un espace beaucoup plus réduit, la problématique du trafic de stupéfiants qui rayonne sur la dalle, quand bien même il est orienté sur le secteur du Bourbonnais. »
La mixité sociale par le logement
« La question de la mixité sociale concerne ce quartier, mais elle dépasse largement Villejean et la dalle Kennedy : c'est la concentration de populations précaires dans certains quartiers. On doit avoir des ambitions à long terme d'un plus grand parcours de mobilité dans le parc social et avoir une attention particulière à de la mixité sociale. Ça marche dans les deux sens. Dans un certain nombre de quartiers gentrifiés, on amène du logement social. » Christophe Fouillère reconnaît la difficulté de faire se rencontrer des gens différents : « Pour la fête sur le stade de Beauregard, il n'y avait pas de Blancs. Chacun reste dans son coin.
On essaie de promouvoir des animations sur l'espace public, ouvertes à l'ensemble des habitants du quartier. Il y a des initiatives. On peut avoir une réflexion sur les vecteurs de communication, comment on va toucher le public.
Se connaître et ne pas avoir peur de l'autre, est un premier pas. C'est l'un des objectifs de la ville dans le travail de conventionnement avec les associations et les équipements de quartier. « Cohésion sociale et vivre ensemble», oui j'ai l'impression que ça marche, mais pas suffisamment".
"Faire de la grande hauteur, répond à la demande des Rennais de diversités d’architectures urbaines".
Des places de stationnement
« Il y a une question d'attractivité économique sur le quartier, avec une offre de formations accessibles. On a un écosystème scolaire intéressant, deux lycées, et le métro qui permet de réguler très vite, et de relier le quartier aux quatre quadrants de la ville.
Face au problème de stationnement résidentiel sur la voie publique, une solution existe : supprimer des places de parking. Car plus on a de places, plus on attire la voiture. Pour autant, si cette voiture sert aux gens du quartier pour trouver un emploi ailleurs et avoir cette mobilité d'emploi, malgré des emplois pas très bien payés, il faut leur permettre de le faire».
Construire en hauteur sur les boulevards
« A Villejean, on a eu une opération en zone d'aménagement concerté, la Zac Normandie Saumurois avec la construction de logements. Vous avez aujourd'hui une densification sur l'axe Saint-Brieuc / Jean Baptiste de la Salle. Le long des faubourgs, environ 4% de la ville, en densification pour garder le tissu pavillonnaire par ailleurs. Globalement sur Villejean, la population suit l'évolution de la ville. Pour autant, dans un certain nombre d’îlots, on a une baisse de la population. Sur la zone Saint-Brieuc/ Jean Baptiste de la Salle/ route de Vezin, on a perdu de la population. L'orientation du plan local d'urbanisme aujourd'hui, c'est la densification des faubourgs , des grands boulevards. Des projets de collectifs remplacent des maisons individuelles. L’initiative en revient à des sociétés privées ou des bailleurs sociaux soutenus par l’Etat. Faire de la grande hauteur, répond à la demande des Rennais de diversités d’architectures urbaines. Ça correspond à une attente de logements.
Vous entendez beaucoup, via la presse et les réseaux sociaux, les opposants qui ont une capacité de mobilisation. Et vous n'entendez absolument pas tous ceux (une majorité silencieuse) qui ont tout à fait conscience que la ville va devoir héberger les Rennais, les enfants des Rennais, ce n'est pas qu'une question d'accueil des populations extérieures. Ils sont tout à fait conscients des problématiques de dérèglement climatique, de nécessité de zéro artificialisation des sols. La ville ne grignote pas sur la nature".
Rue Merlin l'enchanteur, un collectif s'oppose à la construction d'une tour de 17 étages, Bd Jean Baptiste de la Salle.
Des logements pour étudiants
« On a cherché à avoir des constructions de logements, par exemple de cités universitaires dans le quartier Normandie-Saumurois. Nous avons des objectifs de bon accueil, de logements pour étudiants, ça nécessite de la production et de la réhabilitation. Pour autant, ça ne suffit pas et donc les étudiants vont chercher des locations dans le parc privé. On cherche en plus des logements libres et des logements Crous réservés aux boursiers, pour ne pas faire des résidences à haut standing étudiants, ce n'est pas dans notre ADN.
Aujourd'hui, sur Villejean, il y a une mobilité dans le parc privé. Des habitants quittent Villejean, pour diverses raisons. Le plus souvent des personnes âgées deviennent dépendantes, ne peuvent plus habiter leur logement ou décèdent. Il y a alors une transmission et une mise en vente du logement. Un certain nombre d'investisseurs recherchent des biens à proximité de centres universitaires offrant un retour sur investissement très important. »
Peu de logements pour les classes moyennes
Deux questions essentielles se posent pour Christophe Fouillère : la spéculation immobilière et la qualité de logement des étudiants. « Il n'y a plus de biens à vendre pour des familles de classe moyenne. Ça a des effets directs sur la mixité sociale, sur la mixité scolaire. Ça peut entraîner à terme, un quartier avec des personnes éligibles au parc social, souvent parmi les plus pauvres et les plus précaires avec des étudiants à côté, et ne plus avoir un parc privé qui a la vocation d'accueillir d'autres typologies de population, sur lesquels il n'y a pas d'objectif de politique publique. Ça relève du droit de propriété privé, c’est l'un des principes fondamentaux de notre société et des droits de l'homme. La collectivité publique a peu d'outils pour intervenir sur le parc privé. On peut se poser la question de savoir s'il y a un détournement de l'usage du logement.
Sur certains Îlots, on vit dans un entre-soi au sein d'un parc social ou entre copropriétaires dans le parc privé. Dans le quotidien, on n'a pas forcément, ni l'envie, ni le besoin, ni l'opportunité d'aller à la rencontre de celui qui est dans un autre type de logement ou dans d'autres problématiques sociales. Il y a la question des étudiants, qui vivent à leur propre rythme, qui peut être décalé de celui des habitants. Pendant la période de confinement , des plaintes pour tapage nous ont été signalées. Les lieux de fête en centre ville étaient fermés, ça s'est reporté sur les logements ».
Propos recueillis par Catherine Verger et Jean-François Bourblanc
(1) Extraits d’un long entretien réalisé en novembre 2021. Dans une deuxième partie, Christophe Fouillère évoque les initiatives municipales, actuelles et futures, pour le quartier : Des actions et des projets pour Villejean
Le marché du vendredi est à la fois un circuit court d'approvisionnement et un lieu de rencontre. (photo 22 février 2019)